Alimentation & Boisson

Kakushi Sushi, les délicieux sushis de la rébellion

Kakushi Sushi, les délicieux sushis de la rébellion

En commandant des sushi kakushi pour la première fois, sauf si vous savez à quoi vous attendre, vous risquez d’être fortement surpris si ce n’est déçus. Car, en déballant cette spécialité d’Okayama, tout ce que vous trouverez sera finalement des œufs coupés en morceau recouvrant une simple quantité de riz blanc.

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The entrance to Kibizen Japanese Restaurant.

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À première vue, le kakushi sushi paraît vraiment simple.

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Au moment de retourner le bento kakushi spécial à double côté.

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La délicieuse sauce d’accompagnement servie avec le kakushi sushi (ici le kakushi a le côté caché vers le haut)

Ça y est, vous êtes définitivement déçus ? C’est parfait, vous en êtes là où je voulais vous amener ! Et quand bien même l’on serait à la période Edo que je voudrais toujours que vous soyez bien déçus pendant que moi-même, je déguste tout seul mon sushi décevant.

Maintenant vous devez vous demander pourquoi quelqu’un se donnerait autant de mal pour concevoir une spécialité finalement si quelconque ? La réponse est savoureuse : il s’agit d’un acte de rébellion, et le sushi décevant ne l’est peut-être pas tant que ça !

Bien que certains détails soient encore sujets à débats, nous savons pour sûr que, durant le début de la période Edo, Ikeda Narimasa, le 6e seigneur de Bizen Okayama (aujourd’hui connue comme la préfecture d’Okayama) décréta qu’un seul plat était autorisé durant le dîner, ce qui signifiait plus précisément une seule garniture sur le bol de riz.

Selon certaines légendes, les habitants du domaine de Narimasa se sont alors bien moquer de cette loi peu crédible : ils se seraient alors décidés à cacher une corne d’abondance de légumes, crevettes et poissons sous le riz de leurs bentos, leur permettant, une fois à l’abri des regards, de se régaler de leurs kakushizushi, ou sushis cachés. Cependant, d’autres traditions prétendraient que les citoyens d’Okayama auraient plutôt contourner l’interdiction en empilant un mélange de garnitures sur leur riz prétendant que cela ne contrevenait pas à la loi d’une seule garniture. Une habitude qui aurait donné naissance à ce qu’on appelle aujourd’hui les barazushi. De ces deux stratégies de rébellion, personne n’est vraiment d’accord sur le fait qu’elles aient existées ou non.

Quoi qu’il en soit, du côté du restaurant Kibizen, situé dans l’hôtel Granvia d’Okayama, c’est une toute autre version qui est opposée à la loi étonnante du seigneur Narimasa. Il suffit de refermer le couvercle du bento, de le retourner et le tour est joué, prêt à la consommation !

Comme un livre dont la couverture n’est pas forcément révélatrice du contenu, il ne faut pas seulement se fier à la première couche d’un kakushi. Les délicieux mélanges de spécialités d’Okayama et autres produits de saison qui attendent d’être découvert dans chaque kakusushi ne peuvent que ravir même le plus exigeant des gourmets. Crevettes, congres, œufs de saumon salés, sardinelles, racines de lotus, haricots noirs tacheté d’or et plus encore seront à votre portée une fois le couvercle soulevé. Servies comme un menu complet, les spécialités incorporées dans le kakushizushi varient d’une saison à une autre, offrant à chaque fois une harmonie des goûts.

Une autre surprise vous attend après avoir commandé des sushi kakushi : la sauce d’accompagnement. Si aujourd’hui Kibizen fournit de la sauce soja pour contenter les palais modernes, à l’époque du règne de Narimasa, la sauce soja n’était pas si courante. Ainsi, pour montrer les usages de l’époque, Kibizen sert aussi une sauce d’accompagnement alors populaire, réalisée à base de prunes marinées bouillies dans un mélange de saké (le vin de riz traditionnel) et de dashi (du bouillon de poisson).

Le résultat est un délicat et léger mélange qui – grâce à l’arôme doux et à peine perceptible du saké et de la note fruitée de prunes marinées – apporte une formidable touche à chaque morceau que vous choisirez d’y tremper. Et pas besoin de se soucier de choisir entre les deux sauces puisque Kibizen propose bien les deux options. À vous ensuite de rendre votre expérience culinaire encore plus aventureuse en essayant successivement l’une, puis l’autre !

Le dessert, compose d’un thé japonais chaud et de fruits frais et locaux permet de terminer en beauté ce repas.

Lorsque vous serez prêts vous aussi à défier le seigneur Narimasa en participant à la rébellion culinaire du sushi, une spécialité bien étonnante d’Okayama, n’oubliez pas de commander au moins 24 h en avance vos sushis de la rébellion, comme ils sont préparés en nombre limité chaque jour.

Et prétendez bien qu’ils sont ennuyeux, pour ne pas trahir la cause !

Photographs & Text by Peter Chordas

DESTINATION LIÉE

Okayama

La région d’Okayama a prospéré comme une région aux éléments culturels variés, dont les sabres, les poteries de Bizen et d’autres pièces artisanales. Grâce à la clémence de son climat, des fruits, pêches et raisins muscat, sont activement cultivés ici. La région comprend aussi des endroits où vous pouvez découvrir les îles de la Mer intérieure de Seto.