Sur le chemin entre l’embarcadère et le centre de l’île, on retrouve d’autres installations mises en place pour ceux qui voudraient en savoir plus sur les lapins, comme ces ensembles d’oreilles qui permettent de simuler et d’expérimenter la façon dont les rongeurs entendent les sons de manière amplifiée. Un centre d’informations pour les visiteurs permet aussi d’en apprendre plus sur la faune et flore de l’île.

En creusant un peu dans l’histoire de ces lapins, le voile de mignon s’efface pour un passé bien plus sombre. Certains assurent que tous les bêtes à poils de l’île descendent de lapins cobayes amenés sur l’île entre 1929 et 1945. Durant cette période, l’armée japonaise se servait en effet de l’île comme d’un laboratoire géant pour y créer et tester ses armes chimiques. Même si d’autres sont en désaccord avec cette version, une chose est sûre, l’île joua un rôle important dans l’histoire militaire violente du Japon.

Durant cette période, l’île d’Okunoshima fut d’ailleurs rayée de toutes les cartes de la région. Ce lieu devenu top secret produisait des milliers de tonnes de gaz toxique qui furent notamment déployé massivement et mortellement en Chine, causant une période d’horreur et de misère longtemps cachée. Les restes de ces installations de production, à l’abandon, sont toujours visibles aujourd’hui comme le témoignage d’un passé sombre et violent.

L’île d’Okunoshima ne cache pas son histoire dérangeante mais au contraire s’y confronte sans détourner le regard. Le Poison Gas Museum détaille en profondeur l’histoire, avec des détails parfois très pénible, du gaz toxique produit sur l’île, en illustrant également les terribles effets de ces gaz toxiques et chimiques durant les guerres, à la fois celles du passé et celles d’aujourd’hui.

Le contraste entre cette histoire sombre et les hordes de lapins mignons est assez saisissant même si pas forcément étonnant, tant le Japon regorge de ces situations en contradiction et qui se juxtaposent de manière surprenante. Le moderne avec le très ancien, les traditions japonaises qui cohabitent avec celles de l’occident dans de nombreux aspects de la vie quotidienne, en sont les exemples les plus connus. Le fait de voir des hordes de lapins s’épanouissant en liberté parmi des ruines d’anciens bâtiments militaires est un autre exemple de ce kaléidoscope qu’est le Japon d’aujourd’hui.

En plus de d’amener son pique-nique dans le cas d’une courte visite à la journée, l’unique autre option pour se nourrir sur l’île est l’hôtel Kyukamura. C’est aussi le seul endroit où ceux qui veulent passer plus d’une journée avec les lapins passent la nuit. L’hôtel propose tout un panel de services comme l’accès à une piscine, un terrain de tennis et un parcours de golf. Un service de location de vélos, et même de vélos à pédales électriques, permet de circuler plus librement sur l’île. Il est aussi possible de dormir au camping situé près de la mer, où on peut d’ailleurs planter sa tente à côté d’un terrier de lapins !

L’avantage de passer une nuit sur l’île est bien sûr de pouvoir apercevoir les lapins à des moments où ils sont plus actifs, entre le coucher et le lever du soleil. En choisissant les moments où la lumière est la meilleure, entre chien et loup, ou bien juste avant le lever de soleil et vous aurez de superbes photos de lapins. Le meilleur moyen de garder un souvenir inoubliable de cette expérience avec en plus les meilleurs clichés de ces lapins adorables.

Vous avez eu votre compte de lapins et d’histoire sur les gaz toxiques mais vous avez encore du temps avant le prochain ferry ? Quelques chemins de randonnées, plutôt rapides, mènent jusqu’à l’observatoire de l’île. Un bon moyen pour atteindre le sommet de l’île et avoir la vue qui va avec sur la mer intérieure de Seto, suffisamment appréciable pour compenser l’effort de la montée.

Concernant les choses à faire / ne pas faire sur l’île, vous trouverez plusieurs affiches dans les ferrys ou bien dans les embarcadères. Voici un petit résumé pour avoir un aperçu des bonnes manières sur l’île :

- Éviter d’attraper ou de chasser les lapins ;
- Ne nourrissez pas les lapins sur la route ;
- Ne laissez pas de déchets alimentaires partout pour ne pas attirer trop de lapins d’un coup ;
- Ne donnez pas aux lapins de nourritures industrielles et transformées (comme les bars chocolatés par exemple) ;
- Faites attention aux lapins lorsque vous roulez à vélo ;
- N’abandonnez pas votre propre lapin sur l’île, il ne serait pas le bienvenu au sein des populations actuelles ;
- Si vous venez en voiture sur l’île, vérifiez régulièrement la présence de lapins sous la voiture.

Respectez ces règles, et à vous le paradis des lapins. Et pensez bien à amener suffisamment de légumes !

Texte et photographies de Tom Miyagawa Coulton